#Le Désordre à vingt ans
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wetgeliscasualinterval · 2 years ago
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Bulle Ogier from “Le Désordre à vingt ans” (1967)
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zehub · 3 months ago
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30 % c'est…la proportion de Français qui estiment que les désordres climatiques et leurs conséquences sont des phénomènes naturels, comme il y en a toujours eu.
C’est la proportion de Français qui estiment que les désordres climatiques et leurs conséquences sont des phénomènes naturels, comme il y en a toujours eu. Soit une augmentation de sept points par rapport à 2023 et de douze depuis 2020, selon la 25e édition du baromètre « Les représentations sociales du changement climatique des Français » de l’Ademe. Une propension au climatoscepticisme qui a doublé en plus de vingt ans, passant de 15 % en 2001 à 29 % en 2024. « Cette hausse pourrait également traduire le fait que les désordres climatiques et leurs conséquences se sont désormais durablement installés dans l’actualité de la population », tente d’expliquer l’Ademe.
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ameretat · 5 months ago
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J'ai pensé à mon âge, à celui de tous ceux qui dormaient dans cette maison, et j'ai entendu le temps nous ronger tous comme une armée de rats. Nous étions du bon grain. Il y avait vingt-quatre ans qu'on se laissait vivre. On avait compté sur le temps pour mettre de l'ordre dans les affaires de la maison. Du temps avait passé. Le désordre avait gagné d'autant. C'était maintenant un désordre des âmes, du sang. Nous ne pourrions plus guérir, nous ne voulions plus. Nous ne savions plus vouloir être libres, nous étions des rêveurs, des vicieux, des gens qui rêvent du bonheur et qu'un vrai bonheur accablerait plus que tout.
— Marguerite Duras, La Vie Tranquille
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christophe76460 · 7 months ago
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La tyrannie du prophétique. CJP
À travers nos voyages, un des thèmes majeurs que nous abordons, avec Julia, est celui du « prophétique ».
Nous croyons, en effet, que le désir du Seigneur a toujours été, à chaque génération, d’avoir un peuple prophétique qui se lève.
Maintenant, la notion de « prophétique » a été fortement décriée ces dernières années, à cause des nombreux abus de chrétiens qui, soit n’ont pas compris en quoi il consiste, soit l’ont utilisé pour manipuler les autres, soit encore se prennent pour des prophètes qu’ils ne sont pas.
De ce fait, ils ont créé plus de confusion et de désordre qu’autres choses dans la vie des gens et des églises.
Si j'aborde pas mal les abus dans le prophétique, ce n'est pas pour décourager les gens d'être prophétiques, encore moins pour leur faire voir le mal partout, mais parce que, en tant que ministère itinérants je visite beaucoup d'églises et je vois les effets destructifs, autant pour les individus que pour les églises, de ces déséquilibres au niveau du « prophétique ».
Je n'arrête pas de tomber, sur des gens qui, au lieu d’avoir été bénis par telle ou telle prophétie ou tel ministère prophétique (et, merci Seigneur il y en a) ont été abusés.
Dans certains milieux les soi-disant paroles prophétiques lâchées de ci de là ont littéralement détruit la vie des gens.
Le prophétique a été pour eu tyrannique au lieu d’être ce qu’il est prévu d’être au départ : source d’édification et d’encouragement.
Ayant été pasteur d'église pendant plus de vingt ans, j'ai souvent vu les gens les plus déséquilibrés de mon église jouer les prophètes, raconter n'importe quoi sous prétexte de parler de la part de Dieu et être manipulateurs.
J'ai reçu des ministères de passage aussi avec qui nous avons eu de sérieuses surprises.
Comme cette femme qui, à un moment donné, a demandé que chaque membre de l'assemblée vienne mettre de l'argent dans sa main. J'ai dû l'arrêter, mais chez elle, aux USA, elle était reconnue comme « prophétesse ».
Je pense à cette autre, que pas mal d'églises recevaient à une époque et qui débarquait avec toute une valise avec des supports qu'elle utilisait, soi-disant pour prophétiser.
Il s'est vite avéré qu’elle prenait plaisir à rabaisser les hommes et les mettre en situation de ridicule à travers ces supports, comme leur faire porter des masques et chausser des souliers très grands et leur demander de courir tout autour de la salle.
Et, pourtant elle a eu son temps de gloire où tout le monde l'invitait, ça a pris du temps à beaucoup pour réaliser que quelque chose n'allait pas chez elle.
Beaucoup d'églises ont été harassées par ces prophètes de pacotilles. On avait tellement soif de surnaturel, à une époque, qu'on leur a laissé faire n'importe quoi.
Dans une certaine îles, un pasteur me disait, qu'il avait fait confiance à un certain ministère qui se disait prophète, mais ce dernier lui a volé la moitié de ses brebis en cachette, pour monter sa propre église.
Un « prophète » a donné cette parole à tout un groupe musical d'une certaine église, c'est que Dieu lui montrait qu'ils devaient la quitter. Ce qu'ils ont fait !
La réalité est que ce « prophète » ne s'entendait plus avec le pasteur de cette église et qu'il a, donc, prophétisé ses émotions, et a exprimé sa vengeance sous forme d’une « parole de Dieu ».
Autre exemple : cette jeune fille qui voulait quitter une certaine église, c'est alors que - comme par hasard - on lui prophétisa qu'elle allait trouver son mari dans cette église.
La fille y est restée bloquée depuis et, toujours pas de mari à l'horizon, bien sûr !
Vous comprenez qu'il y en a assez de toute cette mascarade, et qu'un seul message pour mettre en garde et dénoncer ces abus ne suffit pas.
Donc je ne vais pas m'excuser de vous les partager !
Mes messages sur les mises en garde vis-à-vis d’un pseudo prophétique, en fait, dérangent surtout ceux qui veulent que les gens continuent à dire « amen » à tout ce qu'ils disent, sans le discuter, ni l'analyser.
Or l’apôtre Paul nous dit à la fois de ne pas mépriser les prophéties, mais d’analyser toutes choses dans ce domaine ; et de ne retenir que ce qui est bon.
Il faut comprendre que le lorsque le prophétique vient réellement d’En Haut :
- Il n’apporte pas plus de confusion là où il y en a déjà suffisamment, mais nous sort de la confusion.
- Il ne met pas plus de désordre que ce qu’il y en a déjà - comme le fait un pseudo prophétique trop répandu - mais remet de l’ordre là où il y a du désordre.
- Il ne vient pas rajouter des ténèbres, mais apporte de la lumière.
- Il clarifie notre appel en confirmant ce qui est y déjà placé dans « nos entrailles » par le Saint-Esprit !
- Il libère les gens au lieu de les asservir !
- Il fait arriver des guérisons et des délivrances, suite à des paroles de connaissance, de sagesse qui lui sont souvent associés, au lieu de l’abattement et la dépression.
Bref, c’est du concret et du positif !
Les abus ne doivent pas nous faire remettre en question cette vérité : Dieu veut avoir un peuple prophétique, et il faut que les chrétiens prophétiques et les - vrais - prophètes se lèvent, aujourd’hui plus fort que jamais, nous le voulons toujours.
Mais si c'est pour ne pas respecter les règles, et faire plus de dégâts qu’autres choses, de grâce qu'ils restent assis.
Et s'ils se lèvent quand-même, dans votre communauté, ne vous laissez plus intimider et faites-les rasseoir, ou qu'ils aillent « prophétiser » ailleurs !
CJP/Claude
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blogapart3bis · 7 months ago
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Cheeto’s Magazine: Amazingous
Aujourd'hui sur Blog à part – Cheeto's Magazine: Amazingous C’est quoi ce nom de groupe? Cest quoi ce titre d’album? C'est quoi cette pochette? Eh bien c’est Amazingous, de Cheeto’s Magazine, et c’est du prog. Si. #RockProgressif #NeoProg
Il y a des fortes chances pour qu’en voyant cette chronique, vous vous demandiez, dans le désordre, 1) c’est quoi ce nom de groupe? 2) c’est quoi ce titre d’album? et 3) c’est quoi cette pochette? (Aaargh! en option). Eh bien c’est Amazingous, de Cheeto’s Magazine, et c’est du prog. Si. Cheeto’s Magazine est un groupe espagnol qui existe depuis vingt ans. Vous n’en aviez jamais entendu parler?…
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blatterpussbunnyfromhell · 1 year ago
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C'est ouf à quel point ma chambre me fout le cafard. Qu'elle soit en désordre ou bien rangée, y'a un truc de répulsif dedans, j'aime pas y être. J'aime pas dormir dans mon lit, il est trop lourd à replier, il prend trop de place et est trop grand pour moi tout seul. J'ai toujours peur de trouver des bestioles dégueulasses sous mon clic-clac. J'aime pas m'asseoir à mon bureau et j'aime pas la façon dont j'ai organisé mes livres et mes boîtes de rangement. J'aime pas ces rideaux trop longs et trop moches et la vue sur l'immeuble à vingt mètres du mien. J'aime pas cette pièce. Elle est à la fois étouffante, exiguë, surchargée et trop grande, trop vide. J'ai souvent déménagé dans ma vie, mais j'ai jamais eu autant de mal à me faire à une nouvelle chambre. Ça fait deux ans et demi et elle me fout toujours autant le cafard. Je sais pas pourquoi c'est aussi difficile de m'y faire, je sais juste que plus j'y reste, plus je veux en partir.
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atticuswritersoul · 2 years ago
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Comment veut-il que Camélia Abraxas, vingt-trois ans, jeune mère coincée pour le restant de ses jours dans cette prison mobile, lui dise ce qu'elle ressent ? Tout ça était arrivé à cause d'une stupide histoire de balai défectueux. Et dépression n'avait pas tardé à la trouver. D'abord dans la pitié de son entourage, puis dans sa fille qui refusait de lui parler. Elle se faufilait même dans son lit le soir, au milieu de ses rêves, et ne se gênait pas de la réveiller pour lui faire découvrir les nuits blanches. Dépression, douce dépression. C'est à cause d'elle, que Camélia a été obligée de prendre rendez-vous chez cet lui. Parce que sa famille, ses amis, ses proches s'inquiétaient. Mais qui avait dit qu'elle en avait besoin ? Elle était handicapée, pas folle ! Ce n'était pas parce que ses jambes refusaient de lui obéir qu'elle passerait forcément la corde autour de son cou ! Elle était toujours Camélia, toujours, pourquoi n'arrêtaient-ils pas de s'adresser à elle comme si elle s'était transformée en une autre personne ?    Ses iris bleues s'humidifient, mais aucune larme ne coule. Elle hoche de la tête, et il passe à autre chose. Il fait mine de ne pas remarquer ses yeux rougis, ses cheveux en désordre, les cernes sous son regard.    Elle comprend alors qu'Orion Ceasy est la seule personne qui la traite comme si elle était encore Camélia. Ça lui fait autant de mal que de bien, son cœur se consume et s'endurcit. Elle en est soulagée mais attristée, déçue, abattue. Et alors que dépression revient doucement lui susurrer près de son oreille, elle voit les mots. Les mots, doux et violents, qui lui donnent le vertige mais dont la cursive de mouche la rassure. Et tandis qu'Orion parle de sa voix douce et grave, elle ferme les yeux, plongeant dans les ténèbres de son âme.    Pour leur souvenir, pour leur vie, pour nos aimés.
08/12/18 : Les mots
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Son cabinet est petit, aux tons rouges et bruns, ce qui renforce l'ambiance chaleureuse de la pièce. Une fenêtre sur le côté, qui laisse entrer un filet de lumière, et un gros fauteuil jaune rembourré près de ce qui doit être son bureau, mais qui ressemble surtout à une planche de bois sur laquelle plusieurs tas de feuilles ont été empilés à la va-vite. Et quelques poufs qui ont été jetés çà et là.      Elle lève un regard sceptique vers l'homme face à elle. Il est de taille normale, sans doute un peu plus grand qu'elle. Ses cheveux blonds et ses yeux noisettes la regardent fixement, brillant de mille feux. Il n'est pas exactement l'idée de ce qu'elle a d'un psychomage – à vrai dire, il est l'opposé même de ce qu'elle s'est imaginé. Il porte un gros pull bleu et un pantalon blanc, des chaussures marrons. Sur le mur rouge derrière lui, des mots gris ont été écris d'une écriture en patte de mouche, à l'infini. Pour leur souvenir, pour leur vie, pour nos aimés.       - Bonjour Camélia, je suis Orion Ceasy. Ravi de vous rencontrer.       Elle hoche de la tête sans le regarder, son attention restée coincée sur les caractères en forme de gribouillis. Il sourit et se dirige vers elle. Lorsqu'il attrape son fauteuil roulant et se met à la mener en direction du centre de la pièce, elle ressent un horrible frisson remonter le long de son échine. Son cœur bat fort, jusqu'à lui en faire mal, et elle hurle de douleur.      Le fauteuil s'arrête, et Camélia prend quelques secondes à se rendre compte de ce qu'elle fait. Elle se tait brusquement, nauséeuse et honteuse. Honteuse de sa faiblesse, de sa fragilité, de son handicap. Le psychomage vient devant elle, et s'accroupit jusqu'à planter ses yeux chocolat dans les siens. Elle ne perçoit aucune trace de pitié, d'inquiétude ou de peur dans son regard. Juste de la surprise.      - Camélia, quelque chose ne va pas ?      Sa voix est calme et posée, légèrement suave sur les bords. Un peu comme un cocon, elle vient l'envelopper dans sa douceur et sa chaleur. Elle sent ses épaules se détendre légèrement, mais sa méfiance ne baisse pas. Elle reprend son air désinvolte, carapace qu'elle s'est construit depuis son accident, et fait non de la tête. Le sourire du blond revient, et elle se sent soulagée. Il attrape un pouf et le met à côté d'elle pour s'y asseoir, et elle remarque qu'il n'a pas retenté de toucher son fauteuil.      - Alors Camélia, comment allez-vous aujourd'hui ?    Question anodine dans la bouche d'un psychomage anormal. Elle se sent prise au dépourvue, ne sait pas quoi dire. Quelques secondes plus tôt, elle est en train de hurler à s'en casser les poumons, et maintenant cet Orion lui demande tranquillement comment elle va, assis sur un pouf blanc, au milieu d'un petit cabinet qui ressemble à la Salle Commune de Gryffondor. Comment veut-il qu'elle puisse formuler une réponse cohérente ?
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de-gueules-au-lion-d-or · 3 years ago
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« Il y a mort et mort. Les morts de la guerre sont des morts à part, des morts pas comme les autres. Abattus en pleine force. Abattus presque toujours à la minute même où l'on donne tout, où ils engageaient les dernières réserves de l'âme. [...] Mourir à vingt ans n'est pas un désordre ! Mourir si jeune n'est pas un désordre ! On leur a fait tort de vingt ans, de trente ans, de quarante ans de vie. Ils avaient quelque chose à dire. On leur prit la vie comme on retire la parole à quelqu'un. Sans leur permettre d'achever la phrase commencée. »
Georges Bernanos, fragment retrouvé dans les papiers préparatoires de Monsieur Ouine.
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alexar60 · 5 years ago
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Ma petite librairie
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Après quelques mois de formation, avoir récupéré des fonds et réussi le test des banques pour un prêt, j’ai pu enfin ouvrir ma propre librairie. J’avais loué un vieux magasin situé dans le centre-ville de Nantes et m’étais spécialisé dans le livre ancien ainsi que sa restauration. Je pris vite de l’ampleur grâce aux premiers ouvrages récupérés par-ci par-là, cependant tous de valeur historique. La première encyclopédie de Diderot mais aussi une édition très ancienne de Candide de Voltaire furent mes premières ventes. Mon magasin fut un réel succès, on venait de très loin pour acheter ou apporter des ouvrages à réparer.
Je préparai ma énième participation au salon du livre quand un homme se présenta dans la boutique. Il apporta un livre très abimé que je ne connaissais pas. Ni le titre ni l’auteur ne semblaient être connus. Je fis un rapide devis vu l’état des pages et de la reliure. L’homme parut gêné par le prix toutefois, il accepta en disant : « Après tout, il doit y avoir beaucoup de travail à faire ». Puis il partit, précisant qu’il ne pourra récupérer son livre que dans deux mois minimum parce qu’il partait en voyage. Je le raccompagnai à la porte et revins feuilleter ce livre. Il s’agissait d’un recueil de sciences occultes. Je lis quelques passages difficiles à comprendre car il était surtout écrit en latin et en grec. Pourtant je lis un chapitre en vieux français qui m’interpela à propos d’une formule à prononcer. La page ayant été trop abimée, je ne sus de quelle expérience il s’agissait.  Je lis quelques mots à voix hautes avec amusement. Puis je Posai le livre dans une boite hermétique afin de le préserver au mieux et le rangeai sur une étagère dans l’arrière-boutique.
Je repris ensuite mon travail sur le dossier du salon d’exposition. Une heure plus tard, une femme entra dans le magasin. Elle sembla totalement désorientée regardant les étagères avec de grands yeux. Je demandai si elle désirait un renseignement, elle me dit simplement : « désolée, j’ai cru que c’était un magasin de fringues » avant de sortir dans la rue. Elle se retourna, regarda la devanture tout en gardant un air étonnée. Elle s’éloigna après avoir haussé les épaules. Je repris mon travail et fus surpris de voir deux autres femmes entrer dans le magasin. Elles parlaient fortement, riant quand l’une d’elle exclama : « Mais ce n’est pas un magasin de vêtements ! ». Elles sortirent aussi vite qu’elles sont entrées telles des petites tornades tropicales. Je continuai de travailler malgré les nombreux clients dans l’erreur. Pratiquement tous entrèrent dans la librairie, persuadés avoir affaire avec un magasin de vêtements et aucun pour des livres.
Après avoir fermé le magasin, je restai pour commencer à travailler la restauration du livre. La tache fut délicate car les pages jaunies avec le temps n’étaient plus reliées. De plus, elles étaient en parti en désordre. Je dus commencer par les replacer dans l’ordre avant de commencer le collage en utilisant des matériaux naturels d’époque. Je passai une bonne partie de la nuit sans finir. De toute façon, j’avais prévu plusieurs jours de manipulation dans le devis. En effet, ce n’est qu’au bout d’une semaine que j’achevai ce travail. Il y avait besoin de tout refaire en passant par la reliure, la dorure de certaines pages et les coins de pages détériorés. Je gardai le livre dans mon magasin, attendant le retour de son propriétaire.
De temps en temps, je recevais encore des clients dans l’erreur. Ils entraient, persuadés qu’il s’agissait d’un magasin de mode. Je commençai à croire à une erreur généralisée quand un facteur entra avec un recommandé pour une madame Stéphanie Antoine. L’adresse était la bonne, mais cette femme n’était pas gérante du magasin comme indiqué sur le courrier. Je perdis cinq bonnes minutes à expliquer au facteur qu’il s’agissait d’une méprise. Peut-être même d’une mauvaise blague car le magasin dont elle était censée être gérante était un « Zadig & Voltaire». A la place d’une librairie, j’ai trouvé cela drôle. En plus, il n’y avait aucun magasin de ce nom dans la rue. De même, je reçus aussi deux lettres au nom de ce magasin que je gardais sans aucune raison, au cas où quelqu’un les réclamerait.
Comme prévu, l’homme récupéra son livre après deux mois. Il était ravi de mon ouvrage. D’ailleurs, il ne l’avait pas reconnu de suite. Il feuilleta quelques pages pour vérifier qu’il s’agissait du sien. Puis il paya et partit. Je le revis plusieurs fois apportant quelques livres anciens intéressants. Il acheta même des vieux Jules Verne. Il conseilla même mes services à des amis. Cependant, je ne fis pas le lien entre ces gens qui se trompaient et le livre mais après sa récupération, je ne reçus plus de personne se trompant de boutique.
Les années passèrent, je modernisai la librairie. Après vingt ans au même endroit, je décidai d’agrandir et prendre un atelier plus intéressant. La librairie déménagea donc pour une boutique plus spacieuse et mieux placée. En rendant la clé au propriétaire. Il semblait légèrement déçu. Nous discutâmes sur l’avenir du magasin, il avait trouvé preneur, le nouveau locataire devait arriver dans la minute.
En effet, une jeune femme métissée au corps svelte entra. Je remarquai de suite sa passion pour la mode en voyant son tailleur et son déhanché. Je devinai qu’il s’agissait d’un ancien mannequin. Elle serra ma main tendue puis celle du propriétaire avant de prendre la clé. Mais je fus effaré quand  il prononça son nom : « Stéphanie Antoine ». A ce moment, je la dévisageai. Elle était jeune et ne devait pas avoir dix ans quand le facteur était passé avec un recommandé à son nom. Elle répondit en souriant à ma question sur son futur magasin : « C’est une franchise d’une marque de prêt-à-porter, Zadig & Voltaire. Vous connaissez ? » Je fis oui de la tête. Je rentrai ensuite chez moi, interrogatif, aussi inquiet de découvrir cette étrange coïncidence. Une fois à la maison, je fouillai dans de vieilles affaires et retrouvai les deux lettres au nom de Stéphanie Antoine. Elles étaient dans des archives de comptabilité. A l’époque, je les avais ouvertes. Ce n’étaient que des relevés de comptes. Par contre, vu la date écrite sur chaque courrier, elle était censée les recevoir dans cinq ans.
Alex@r60 – février 2020
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madi4son · 5 years ago
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L’Étang d’à côté #1
Moi c’est Ethan, j’ai dix-sept ans et je suis en dernière année au Newport Harbor High School. Mes parents biologiques m’ont abandonné il y a seize ans. J’ai  enchainé les familles d’accueil durant deux ans. J’ai finalement été adopté à l’âge de trois ans et emménagé dans une nouvelle famille. Je me rappelle de pas grand-chose concernant mon installation, juste que tout était immense ; les pièces, les objets, le lustre du salon et celui de la salle à manger ; j’étais haut comme trois pommes à l’époque, comme me le répète ma mère dès qu’elle est prise de nostalgie. Notre maison se trouve à Newport Beach dans le comté d’Orange, pas très loin de mon lycée. J’ai toujours fréquenté les écoles privées locales et j’ai donc eu la chance de tisser des liens avec certaines personnes dont ma meilleure amie Océane. Elle habite à Irvine, à environ quinze minutes de chez moi. Tout les vendredis, je suis convié à déguster les lasagnes maison de sa mère. Notre relation est l’une des très rares choses qui comptent pour moi.
Ce soir là, devant chez elle, j’aperçois une magnifique jeune femme accompagnée d’un homme certainement plus âgé qu’elle. Il avait la moustache bien taillée et très grise, les cheveux court avec un début de calvitie. Il était vêtu d’un pull en cachemire en col-roulé bleu foncé, d’un pantalon classique noir et d’une veste de la même couleur. La jeune femme quant à elle portait une robe assez moulante et courte, semblable à celles que les péripatéticiennes pourraient porter. Après m’être fait remarqué à cause de mes regards insistants, j’appelle  Océane pour la prévenir que je suis arrivé devant chez elle. L’odeur des lasagnes de sa mère inhibe tout le quartier. A la fin du repas, je remercie Mary, sa mère, alors qu’Océane m’attire dans sa chambre. Un petit film sur Netflix puis je repars chez moi. 
J’arrive vers vingt-deux heures à la maison, Renée et Carlisle sont dans leur chambre et regardent la télé. Je frappe pour les prévenir de mon arrivée et leur souhaite une bonne nuit. Je retrouve ma chambre, pas comme je l’ai laissée avant de partir, là elle est rangée. Je redécouvre cette pièce. J’avais oublié à quel point elle était spacieuse à cause du désordre constant que j’y mets. Avant de profiter de cette chambre  “clean”, je pars remercier ma mère et m’écroule sur le canapé avant d’allumer la télé. Je reste à zapper les chaines jusqu’à tomber sur un bon film d’horreur. Un autre a suivi et au final, je n’ai pas dormi de la nuit. J’ai repris des forces toute la journée, réveillé à plusieurs reprises par Renée qui venait s’assurer que tout allait bien.
Le lendemain, mes parents et moi nous rendons à la plage de Newport, comme tous les dimanches. Journée terminée, nous louons un DVD et commandons une pizza. Huit heures, j’embrasse tout le monde et monte dans ma chambre. Je prépare mes affaires pour demain et consulte mon emploi du temps. Notre prof d’anglais étant en congés maternité, elle est remplacée demain, j’espère juste de ne pas la regretter. 
Huit heures trente, mon réveil sonne. Je ne veux pas me réveiller plus tôt, mais j’arrive tout le temps en retard en cours. Les deux heures de maths sont passées très rapidement puis est venu le tour du cours d’anglais. La nouvelle prof est canon ! Dieu merci elle n’est pas fripée, même si elle est vache avec les élèves, je pourrais au moins me divertir les yeux. Vers le milieu du cours, après sa présentation, une ampoule ma littéralement éclairé le cerveau. La femme que j’ai vu près de chez Océane… Non ?!?! Ce n’est pas possible ! Après il est vrai que les enseignants ne sont pas si bien payés que ça… mais non! La prof ne peut pas être une prostituée, je ne pouvais pas y croire. Elle n’arrête pas de m’observer maintenant. Merde je suis grillé! La sonnerie retentit, j’essaie de m’éclipser le plus rapidement possible mais…
Jeune homme, s’il vous plait !
Je fais comme si de rien était. « Ethan, la prof t’appelle je crois ». Plus possible de faire demi-tour. Je me retourne avec un grand sourire hypocrite vers elle. 
Oui madame ?
Est-ce que tout va bien ? Vous aviez l’air ailleurs durant toute la séance.  
Euh…? Je ne vois pas de quoi vous parlez. Je décide de faire l’ignorant.
Oui, vous étiez absent. Je veux juste m’assurer que ce n’est juste passager et que vous vous investirez plus durant les semaines à venir. Insiste t-elle.
Euh oui. J’ai beaucoup de chose en tête en ce moment. “Notamment le fait que vous soyez une...” STOP ! J’interromps la voix dans ma tête. 
Bon et bien dans ce cas, j’espère que vous ferez le tri rapidement. Il ne faudrait pas que tout ça ait des répercussions sur votre travail. 
Oui évidemment, lui dis-je. 
Bonne journée, Ethan c’est ça? 
Bonne journée à vous également.
Au moment de partir, je décide de jouer carte sur table et me retourne vers elle, au moins si je me trompe, je serai fixé.
En fait, vous avez raison. J’ai été perturbé surtout parce que je connais votre secret et ça m’a intrigué pendant tout le cours.
Mon secret? Répond t-elle complètement déroutée.
Je sais que vous êtes une prostituée.
Pardon? Mais d’où tenez-vous ces propos ? Elle devient rouge de rage, de honte, de stupéfaction. 
Je vous ai vu accompagnée d’un homme beaucoup plus âgé que vous l’autre soir, et disons que vous étiez vêtue d’une robe très… comment dirais-je… ? …très alléchante. 
Non mais je rêve là, c’est ça ? Dit-elle d’une voix sévère et vexée. Je plains votre mère d’avoir éduqué un enfant aussi petit d’esprit et impoli, et je dirais même enfantin avec un soupçon de perversité si ce n’est pas plus. Ça n’en restera pas là jeune homme. Hors de ma vue ! 
Je crois que je regrette mes propos maintenant. Je me sens tellement mal, pas pour elle mais pour moi, comment ai-je fait pour être aussi con?  Penser que la prof était une pute. Quel débile mental. Quoi qu’elle n’a pas vraiment démentit mes propos non plus. Non stop ! Il faut que j’arrête, ça va beaucoup trop loin. 
Désolé madame, je suis vraiment désolé. Je bégayais tellement j’étais mal à l’aise. Je ne trouvais plus mes mots. Vraiment désolé. 
Elle me jette un coup d’œil froid alors que je me dirige vers la sortie limite en titubant de nervosité et de malaise. 
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Slow Burn, BatB fic, StanFou, chap 18
Ce soir-là, la taverne bruissait de monde et d’un joyeux brouhaha. C’était une première importante pour Stanley et LeFou, qui étaient arrivés ensemble et qui célébraient cette première sortie en couple. Naturellement, ils ne se tenaient pas par la main, ne s’étaient pas embrassés ou n’avaient eu de geste explicite ou même ambigu en public, mais c’était important tout de même pour eux. Leurs plus proches amis s’étaient rassemblés autour d’eux et ils bavardaient avec animation. Les triplées bourdonnaient autour de Dick avec un enthousiasme empressé, car leur aîné avait annoncé, fier comme un pou, que Magdeleine attendait un nouvel enfant. Tom discutait avec LeFou d’un projet qu’il avait d’ouvrage de ferronnerie. Stanley échangeait avec Samuel et Renée les dernières nouvelles du voisinage. Olivier le tavernier arrosait les choppes de tout ce monde et tenait aussi sa partie des bavardages.
Ils ne remarquèrent pas tout de suite la vieille Clothilde qui était entrée avec quelques personnes derrière elle. Elle alla droit à LeFou dès qu’elle l’aperçut, et agita devant son nez un long doigt maigre, son bonnet tuyauté tressautant dangereusement sur sa tête décharnée.
- Je t’y prends, dépravé !
LeFou fronça les sourcils, perplexe.
- Hein ?… De quoi parlez-vous, Clothilde ?
La vieille femme le toisa, les poings sur les hanches. Elle désigna Stanley du menton.
- Tu as perverti cet enfant !
- Comment ?
- Mais de quoi elle se mêle ! S’écria Stanley, ulcéré. Cessez ce scandale, Clothilde ! Et mêlez-vous de vos affaires !
- C’est l’affaire de tout le monde que les horreurs que vous commettez !
- Des horreurs ? Répéta Tom, stupéfait.
- Mais de quoi parlez-vous ?
- Des abominations que ces deux pécheurs commettent, en violant les règles divines ! Je refuse de les citer, mais vous pouvez les imaginer sans peine !
Le brouhaha de la taverne s’était tu. Toute l’attention s’était concentrée sur l’assemblée divisée entre LeFou, Stanley et leurs amis d’une part, Clothilde et sa clique d’autre part.
- Servir Gaston avec ce zèle servile qui ne laissait pas de place à l’imagination était déjà une peine à soutenir du regard, dit-elle en fixant LeFou qui luttait pour ne pas rougir, mais étaler ainsi votre perversion est une honte ! Vous devriez avoir honte ! S’écria Clothilde.
Déjà, des chuchotements et des murmures couraient dans l’assemblée. Une partie de la foule semblait indécise quant au parti à soutenir.
Stanley était furieux. Il sentait que LeFou, son cher et doux Étienne, habitué à supporter les reproches, allait peut-être battre en retraite, mais s’il flanchait, c’était lui qui prendrait le relais. Après tout, dans un couple, quand l’un des deux était en difficulté, l’autre faisait de son mieux pour l’aider.
- Voulez-vous vous taire, vieille harpie, grommela-t-il d’un ton menaçant mais calme. Vous ne savez que créer des malaises et de la chicane autour de vous ! Arrêtez de vous mêler des autres et retournez à votre baraque !
Clothilde, galvanisée par la petite assemblée qu’elle avait réussi à rassembler autour d’elle, s’approcha du jeune tailleur.
- Tu n’es encore qu’un enfant, lui dit-elle d’un ton pointu. On en reparlera quand tu seras devenu adulte !
Il est vrai qu’à cette époque où la majorité était encore fixée à vingt-cinq ans, Stanley avait encore deux ans à attendre avant de disposer totalement de sa personne.
Impossible de tirer l’épée devant une femme. Ce n’était pas une de ces rixes qu’on pouvait évacuer à coups de poing, bien sûr ! Dick et Tom fulminaient. Voilà qui n’était pas dans leurs habitudes, de devoir désamorcer une dispute de taverne par les mots. Et la menace était de taille.
Si la vieille Clothilde parvenait à retourner l’opinion publique à son avantage, les conséquences seraient dramatiques pour LeFou et Stanley. Au mieux ? La Maison des Lunes en aller simple et des semaines de souffrances à l’asile avant de périr de dénutrition, de maladie et de mauvais traitements. Au pire ? Le viguier, les juges, un procès… Et le bûcher.
Des sillons de sueur se mirent à couler sur les tempes de Stanley, faisant tomber quelques mèches de cheveux sur son front. Toutes ses craintes étaient pour Étienne. Il avait déjà subi la mort de ses proches, la guerre, l’humiliation auprès de Gaston… Le destin ne pouvait-il pas le laisser enfin en paix, maintenant qu’ils s’étaient enfin trouvés !!
Étienne, de son côté, tentait de reprendre son calme. Que cette vieille harpie le prenne, mais qu’elle laisse Stanley tranquille. Son esprit dévoré de panique à l’idée qu’il puisse arriver la moindre chose à son bien-aimé le plongeait dans un désarroi profond, où il semblait ne pouvoir qu’assister aux événements, passif. Ils avaient été trop imprudents. Il lui semblait voir éclore, ça et là dans la foule, comme autant de fleurs vénéneuses, des regards accusateurs dans leur direction.
Clothilde arpenta la taverne, cherchant d’autres alliés.
Elle aborda la fille aînée du barbier, qui conservait un ressentiment tenace envers LeFou pour avoir dédaigné ses avances -et Clothilde le savait.
- Alors, mademoiselle Clorinde ? Que pensez-vous de cette affaire ?
- Si LeFou est coupable, qu’on l’accuse ! Jeta la jeune femme, que son célibat forcé avait rendu fort aigre. Elle s’était bien fiancée avant la guerre, mais le malheureux n’avait pas survécu aux batailles et son caractère odieux l’avait prémunie d’attirer d’autres partis.
- Maître Louis ?
Le gros homme but dans sa choppe et essuya délicatement sa formidable moustache avant de répondre.
- Pas de preuves, pas d’accusations. Et que je sache, vous n’êtes pas juriste ! De quel droit vous arrogez-vous celui d’accuser vos semblables ?
- Il va du bien public de dénoncer les désordres !
- Mais de quels désordres vous voulez parler ? S’écrièrent Benjamin et Jacquot.
- Silence ! Les enfants n’ont pas le droit à la parole ! Cria Clothilde. À vous, monsieur Fabien.
- Gardez vos sornettes pour vous, répliqua l’ancien meunier. Cette histoire ne m’intéresse pas.
Plusieurs voix approuvèrent monsieur Fabien. La bienheureuse influence du père Robert sur ses ouailles avait engagé les habitants de Villeneuve à plutôt juger les gens sur les actes qu’ils accomplissaient pour aider leur prochain que sur leur façon d’être, bien que, Clothilde en était la preuve, tout le monde n’ait pas forcément profité de ces leçons. Quelques âmes avaient été un peu bousculées par la nouvelle des inclinations de certains habitants, puis finalement, tant qu’ils agissaient bien par ailleurs, quelle importance ? Plusieurs groupes, çà et là, reprenaient leur discussion et se désintéressaient de la meneuse du scandale.
Clothilde enragea en silence. Elle décida d’abattre une de ses cartes maîtresses, car elle avait un notable attaché à son parti.
- Maître Gustave ! Lança-t-elle à son frère. Vous avez eu LeFou et Stanley comme élèves, vous pouvez nous dire s’ils ont des propensions au péché…
Le maître d’école se redressa en toussotant, prenant un air important.
- Il est vrai… Il est vrai que je les ai eus tous deux comme élèves.
Stanley et LeFou se regardèrent. L’école à Villeneuve n’avait été un bon souvenir ni pour l’un ni pour l’autre. Stanley n’avait passé qu’un an entre les griffes de Maître Gustave avant que sa famille ne l’envoie prendre des leçons, cinq ans durant, chez un autre maître qui s’était avéré bien meilleur et autrement plus aimable. Quant à LeFou, ses parents n’avaient pu envoyer leur rejeton que deux ou trois mois en classe, puis le décès de Mr Le Folliet père avait définitivement arraché le petit garçon aux bancs d’école, sans regret excessif.
- J’ai pu déceler chez ces deux enfants des dérèglements de l’esprit propices à ces mœurs dissolues, car LeFou se plaisait à cueillir des fleurs pendant la récréation au lieu de se battre comme ses camarades !
Quelques éclats de rire moqueurs accueillirent cette preuve irréfutable.
- Silence ! C’était un élève en deçà du médiocre, qui n’a jamais su apprendre ses lettres en dépit de mes soins diligents ! Cela prouve bien la dégénérescence de son esprit…
- Menteur !
- LeFou sait lire et écrire !
- Il m’a même écrit pour sa prochaine commande de foin !
- Et on sait que Stanley lui a appris !
- Parlons-en de Stanley ! Rebondit Maître Gustave, qui tentait en hâte de reprendre la main sur la discussion. Seul un œil exercé comme le mien a su détecter chez lui une mollesse particulière…
- Il était le premier à se battre à l’épée avec nous à la récréation ! Rétorqua un ancien camarade de classe.
- … Un affaiblissement des facultés d’apprentissage…
- Il a appris à lire le premier de notre classe !
- … Et une sournoiserie inhérente à son esprit corrompu qui…
- Silence, Maître Gustave !
- Allez répandre vos horribles mensonges ailleurs !
- Stanley n’est absolument pas comme vous le décrivez !
- Vous êtes juste le pantin de votre sœur !
- Sortez !
Maître Gustave reçut une pluie de boulettes de mie de pain et d’aspersions de bière qui le forcèrent à battre en retraite. Clothilde enrageait.
- Il n’y a donc personne ici qui croie en la morale divine ? S’écria-t-elle, les bras au ciel.
Le silence se fit. Gaston venait d’entrer, et Samuel étant celui qui se trouvait le plus près de la porte, il s’était chargé de lui expliquer l’affaire en deux mots.
- Qu’est-ce qui se passe, ici ? Tonna-t-il de sa voix la plus impérieuse.
- Vous abritez un serpent en votre sein, déclara Clothilde. LeFou est un criminel !
- Tiens donc. A-t-il donc tué ?
- Non !
- Volé ?
- Non…
- Blessé quelqu’un ?
- Il a corrompu un enfant !
- De quel enfant parlez-vous ?
- Stanley Laurent ! Glapit la vieille en montrant le jeune homme du doigt.
Gaston regarda Stanley, qui lui rendit son regard avec un air où se mêlaient crainte et courage. Il était évident qu’il ne se rendrait pas sans se battre. Gaston nota l’attitude protectrice qu’il avait en s’étant posté inconsciemment devant LeFou. Celui-ci semblait en proie à la panique la plus sombre, et ne pouvait que garder un air à peu près impassible, mais bien révélateur auprès de ceux qui le connaissaient bien. Une des triplées lui avait entouré les épaules d’un bras et lui parlait doucement, dans l’espoir de le réconforter un peu. Le malheureux était d’une pâleur mortelle.
Me dénoncer ? Fais-le si ça t'amuse, tu seras le premier puni !
LeFou ne se rendait pas compte à quel point il avait raison. Lors de leur dernière discussion, Gaston avait cru le perdre, et plusieurs jours après cette crise, son esprit tressautait encore de terreur à l’idée que cette discussion aurait pu être la dernière entre lui et LeFou.
- Il n’a rien d’un gamin, fit Gaston en désignant Stanley d’un signe de tête. Quant à ces histoires de corruption… Vous voulez dire que mon lieutenant aurait donné une somme d’argent à Stanley pour qu’il vote pour lui ?
- Mais non voyons !!
Gaston faisait évidemment l’âne pour avoir du son. Bien qu’il lui en coûte d’accorder une faveur à Stanley, il ne pouvait faire accuser l’un sans faire tomber l’autre.
- Je ne vois pas de quoi vous parlez. Et LeFou est une des personnes les plus honnêtes que je connaisse. Allez répandre votre venin ailleurs, dit-il d’un ton définitif avant d’aller s’asseoir à son fauteuil attitré.
La vieille femme sentait ses alliés vaciller. Personne ne semblait appuyer ses dires dans l’assemblée, fors un ou deux fâcheux.
- Mon père ! S’écria Clothilde en voyant que le père Robert venait de se lever. Vous savez mieux que quiconque la gravité de ce qui se trame ici !
- Et votre charité sans bornes à accuser bien promptement des gens qui ne vous ont jamais fait de mal, rétorqua l’homme d’église. Allons ! Si vous les estimez si coupables que cela, que ceux d’entre vous qui n’ont jamais péché leur jettent la première pierre ! Mais au moindre mouvement contre eux, j’en écrirai directement à l’archevêché ! Et vous savez à quel point Monseigneur Habert de Crécy déteste les calomniateurs. Il n’a pas hésité à faire excommunier plusieurs personnes pour ce motif l’an passé, prévint le père Robert d’un ton menaçant.
Clothilde sentit le vent tourner. La peur de l’excommunication avait jeté la crainte dans ses rangs, qui s’éclaircirent promptement.
En désespoir de cause, Clothilde se précipita vers la veuve Grandier qui venait de faire son entrée. La veuve d’un riche propriétaire était une voix non négligeable à obtenir.
- Madame Grandier !
- Oui ?
- Vous êtes quelqu’un d’important… Vous pouvez appuyer mes dires !
- De quoi parlez-vous ?
- Il faut faire accuser LeFou !
Amélie regarda LeFou, interloquée.
- Hein ? Mais de quoi l’accusez-vous ?
- Du crime le plus abominable qui soit, fit Clothilde avec emphase. Le crime contre-nature qui est perpétré entre hommes !
Amélie eut un long coup d’œil pour l’assemblée. Visiblement, son avis trancherait la question. Elle n’avait personnellement rien contre le serviteur de Gaston, et honnêtement, se demandait de quoi se mêlait la sœur du maître d’école. LeFou semblait changé en statue. Stanley la regardait d’un air implorant. Gaston la fixait d’un air étrange, où se mêlait une tension extrême et des dizaines de recommandations silencieuses. La jeune veuve prit son attitude la plus digne et regarda Clothilde avec une expression où se mêlaient savamment compassion et ironie.
- Ma pauvre Clothilde, vous déraillez complètement. LeFou, capable de faire une chose pareille ? C’est un membre tout à fait honorable de notre village. Vos accusations ne tiennent pas debout.
- Mais il a corrompu Stanley Laurent ! Piailla Clothilde.
- Corrompu ? Comme vous y allez ! Il me semble que Stanley Laurent est en excellente santé, rétorqua Amélie en regardant le jeune homme.
- Non, mais je voulais dire… Par l’esprit.
Amélie se mit à rire.
- Essayez de trouver une proie un peu plus crédible pour vos prochains délires, fit-elle en passant devant la vieille femme. Pas un des jeunes hommes les plus respectables du village ! À moins qu’être travailleur, honnête, pieux et dévoué à sa famille ne soit pas encore assez pour vous… En ce cas, vous feriez mieux de balayer devant votre porte ! Maître Olivier ? Une eau de Ville d’Avray, s’il vous plaît ! Commanda-t-elle sans plus prêter attention à son interlocutrice.
Le désintéressement de la veuve Grandier envers Clothilde désarma les derniers alliés de cette dernière, qui finirent par partir. Clothilde, comprenant qu’elle n’aurait jamais de quoi faire accuser ses ennemis en bonne et due forme et honteuse de se retrouver seule au milieu de gens qui lui étaient défavorables, s’éclipsa à son tour. La tension baissa significativement une fois qu’elle eut disparu.
Stanley ne put s’empêcher d’aller faire un baisemain galant à la jeune dame.
- Vous avez arrêté un vrai début de guerre, madame, dit-il avec reconnaissance. Je vous remercie mille fois pour vos belles paroles.
Amélie lui sourit.
- Je n’ai pas fait grand-chose pourtant…
- En discréditant une fois de plus Clothilde, vous nous avez permis de conserver la paix.
- Que vous méritez tout autant que n’importe qui, assura Amélie avec un gracieux sourire, portant un grand verre d’eau pure à ses lèvres.
L’assemblée reprit son brouhaha habituel, la crise étant écartée. Gaston eut un regard de reconnaissance pour la jeune veuve, qui avait contribué à sauver son lieutenant. Il leva sa choppe dans sa direction, à quoi elle répondit par un sourire. La même idée était passée dans leurs esprits. Ce soir, ils se retrouveraient pour la nuit.
LeFou, encore déstabilisé par l’événement, fut aussitôt entouré des attentions de ses amis pour le rasséréner. Olivier glissa quelques gouttes de cognac dans sa bière pour le remettre d’aplomb, et Stanley le réconforta bien évidemment. Pendant qu’ils allèrent marcher un peu dehors, Samuel et Renée entamèrent une danse endiablée qui entraîna toute l’assistance, avec un zèle que n’aurait pas renié LeFou en personne. Quelques minutes plus tard, remis de ses émotions, LeFou se mêla au joyeux tapage et la soirée se termina heureusement bien mieux qu’elle n’avait commencé.
Clothilde, découragée par cet échec cuisant et public, désavouée par le prêtre lui-même dont la menace avait fait grand effet, n’osa plus s’attaquer à LeFou ni à Stanley. Elle limita ses efforts à maudire les gamins qui manquaient de la faire tomber en courant sur la place, se plaindre du prix du kilo de carottes et pérorer sur la vertu de la voisine, abandonnant ses rêves de présenter comme la garante des bonnes mœurs de Villeneuve.
La relation entre le lieutenant de Gaston et le fils cadet du drapier et de la modiste était un secret de Polichinelle, mais du moins, personne n’y trouverait à redire.
OoO
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christophe76460 · 2 years ago
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LA CONFESSION DE FOI CALVINISTE DE 1937
La Confession de foi calviniste de 1537 est une confession de foi comprenant vingt-et-un articles écrits conjointement par Guillaume Farel et Jean Calvin en 1537, afin de finir d'organiser l'Église réformée genevoise. Accordant beaucoup d'autorité au corps pastoral, cette confession de foi a suscité une vive résistance, au contraire des « articles » de 1536, un peu moins ambitieux, qui avaient été facilement approuvés par le Conseil.
En juillet 1536, le jeune Jean Calvin (il a 27 ans), de passage à Genève, est convaincu par Guillaume Farel (de 20 ans son aîné) de rester à Genève pour l'aider à y établir la Réforme au plan spirituel et institutionnel, sachant que la ville est passée du côté protestant de manière nominale pour des raisons purement politiques, à savoir d'obtenir son indépendance de la Savoie en s'appuyant sur une alliance avec Berne. En novembre 1536, Calvin participe au tout premier « colloque » des pasteurs de la ville et des environs. En décembre, Farel présente au Conseil les « Articles pour l'unité de la ville et afin d'unir les citoyens dans la foi en Christ » qui lui avaient été commandés par le Conseil en mai et dont le texte ne nous est pas parvenu. Une nouvelle version des Articles est lue au Petit Conseil de la ville en janvier 1537. Bien qu'il soit spécifié qu'ils sont "donnés par maître Guillaume Farel et autres prédicants", on y reconnaît sans ambiguïté le style et les idées de Calvin.
Les principaux points de ces articles sont les suivants:
célébration mensuelle de la cène (ou « communion ») : tout en la souhaitant à chaque culte, cette fréquence mensuelle est proposée en raison de « l'infirmité du peuple ». La volonté de ne pas souiller le sacrement par la participation de gens de mauvaise vie conduit à proposer en même temps un pouvoir de police ecclésiastique avec une gradation de sanctions : admonestation et suspension de la sainte-cène (ce qui ne dispense pas d'aller aux offices pour y être instruit) dans un premier temps, puis excommunication, puis remise aux autorités civiles pour des sanctions pénales, souvent le bannissement.
institution du chant des psaumes, à condition que tout se fasse « sans aucun désordre » ;
institution d'une commission matrimoniale composée de juges et de pasteurs ;
introduction d'un catéchisme pour instruire les enfants des choses de la foi.
Le Conseil des Deux-Cents accepte ces articles sans difficulté. Calvin et Farel, encouragés par ce succès, commencent aussitôt à rédiger une "confession de foi".
La première version connue de la confession de foi de Genève est l'"Instruction et confession de foi dont on use dans l’Église de Genève", dont le texte est communiqué en février 1537 lors d'un colloque tenu à Lausanne. Ce sont vingt-et-un articles qui exposent les principes de la Réforme, sans questions ni réponses, inspiré du Grand catéchisme de Luther mais dont le contenu est incontestablement calvinien. En avril 1537, ils sont édités sous le titre « confession de foi laquelle tous les bourgeois et habitants de Genève et sujets du pays doivent jurer de garder et tenir ». Ils reflètent une idée fondamentale de Calvin : l'Église doit être une communauté de fidèles qui s'y engagent de leur propre gré. C'est pourquoi Farel et lui veulent faire signer ces articles aux citoyens et bourgeois genevois. Afin de vérifier « qui souhaite se rallier à l’Évangile et qui préfère appartenir au règne du pape plutôt que d’appartenir au règne du Christ ».
Les articles de la confession de foi sont présentés ci-dessous et brièvement résumés.
Article I : La parole de Dieu.
Il faut suivre la seule Écriture et non pas la parole des Hommes.
Article II : Un seul Dieu
Suivant les Écritures, il n'y a qu'un seul Dieu. Adorer une autre créature quelconque est une abomination.
Article III : Loi de Dieu, seule pour toutes.
Il faut appliquer la loi de Dieu, et régler sa vie en fonction d'Elle.
Article IV : L'Homme en sa nature.
L'Homme est mauvais, et sa seule chance de rédemption est en la Parole de Dieu.
Article V : L'Homme en soi damné.
L'Homme ne peut attendre que la colère de Dieu car il est fondamentalement mauvais (ainsi qu'il a été dit dans l'Article IV)
Article VI : Salut en Jésus.
Nous croyons en Jésus, qui a souffert pour notre rédemption.
Article VII : Justice en Jésus.
Étant par nature ennemis de Dieu, sujets à sa colère, nous sommes réconciliés avec lui et remis en sa grâce par l'intercession de Jésus-Christ.
Article VIII : Régénération en Jésus.
Par l'Esprit de Jésus, nous sommes capable d'accomplir des choses bonnes.
Article IX : Rémission des péchés toujours nécessaires aux fidèles.
Bien que régénérés par Jésus, nous restons plein de défauts. Jusqu'à notre mort nous nous devons de chercher la rédemption en Dieu.
Article X : Tout notre bien en la grâce de Dieu.
Nous recevons tous les bienfaits de Dieu par sa seule clémence et miséricorde, sans aucune considération de notre dignité ou mérite de nos œuvres, auxquelles n'est due aucune rétribution que de confusion éternelle.
Article XI : Foi.
Nous croyons aux promesses de l'Évangile et à Jésus-Christ.
Article XII : Invocation de Dieu seul et intercession du christ.
Nous rejetons l'intersession des Saints entre les Hommes et Dieu, car cela signifie que nous n'avons pas assez confiance en l'intercession de Jésus-Christ.
Article XIII : Oraison intelligible.
Il faut apprendre la prière "Notre Père, qui êtes aux cieux..."
Article XIV : Sacrements.
Il n'y a que deux sacrements : le baptême et la communion (la cène).
Article XV : Baptême.
Le baptême est le signe que Dieu accepte de recevoir le baptisé parmi ses brebis, ses enfants.
Article XVI: La Sainte Cène.
La Sainte Cène est une communion avec Dieu qui nous rappelle le sacrifice de Jésus son Fils.
Article XVII : Tradition humaine.
Les articles sont faits pour entretenir paix et honnêteté.
Article XVIII : Église.
Les églises sont des endroits gouvernés par la juste parole de Dieu,
Article XIX : Excommunication.
Ceux qui commettent des sacrilèges et souillent la parole de Dieu doivent être excommuniés jusqu'à repentance.
Article XX : Ministre de la Parole.
Les pasteurs n'ont d'autres rôles que d'administrer la parole de Dieu.
Article XXI : Magistrats.
Nous nous devons d'obéir aux magistrats, car ils sont lieutenants de Dieu.
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romainmeynier · 6 years ago
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Janvier dans le désordre. À la librairie Gallimard, boulevard Raspail, pendant que Clément Bénech parle de son essai, un chien aboie : c’est Truite, assise sur les genoux d’Ina Mihalache. Je n’ose pas aller lui dire bonjour. Je sors fumer une cigarette avant de reprendre le métro, puis, apercevant Sigolène Vinson à travers la vitrine, entre de nouveau. Je suis légèrement embarrassé, car notre dernière rencontre avait été étrange : un mélange de choses fortes émane de cette femme, de son récit, de son roman Le caillou, si bien que je n’avais pu lui parler que la gorge serrée et les yeux tout humides. J’avais compris qu’il s’agissait là d’une confusion entre un émoi littéraire et un résidu post-traumatique de la fin de l’année 2015, deux émotions contradictoires reliées à une même personne. Cette fois, le temps a bien passé : nous parlons de titres de livres et portons tous les deux un bonnet.
Une sévère otite s’empare de mon oreille droite. Le seul ORL disponible à l’heure du déjeuner mesure un mètre cinquante de haut sur un mètre cinquante de large. Il a 93 ans. La consultation est légendaire : dans une pièce sombre, il me tend un casque poussiéreux et me fait écouter une série de sons à peine perceptibles sortant d’une machine archaïque. Puis, trois quarts d’heure durant, il fourrage douloureusement mon oreille, sans résultat, et je ressors plus mal en point qu’à mon arrivée. Sur Internet, je regarde les avis sur cet effrayant nonagénaire : Partez loin de ce médecin ! – Fuyez, c’est une pure logique – Notre santé en danger – Agressif, insultant, me forçant à boire un produit sans me dire ce que c’était et ensuite m’a insulté. Le reste de la semaine, je me gave d’antibiotiques, d’antifongiques et, pour préserver ma flore intestinale, avale chaque jour des gélules contenant chacune douze milliards de bactéries, douze milliards, ce qui me fascine pour quelque temps. L’alcool étant tout à fait proscrit avec ce traitement, je n’en bois pas une goutte, et fête mon anniversaire dans un bar, à la grenadine et au Perrier citron. Je suis agréablement surpris de conserver tout mon humour et de sentir une odeur d’alcool sur les joues roses de mes ivres amis.
Je regarde ma nièce. Elle a de grands yeux bleus et des sourcils de curieuse. J’aime l’air poli et intrigué qu’elle aborde face aux choses et aux gens. Elle ne dit rien, encore, et bouge dans son fauteuil comme elle se débattrait dans l’eau. J’ai lu que les nouveau-nés remuaient beaucoup dans leur sommeil paradoxal pour mémoriser les mouvements. Les muscles se souviennent de leur aptitude à fonctionner. Ils s’auto-expérimentent. Dans la pénombre de sa chambre, je la garde longtemps dans mes bras jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Vingt minutes plus tard, persuadé de mes qualités apaisantes, je risque un regard vers son visage et la découvre les yeux grands ouverts, à scruter la pièce noire. Son corps est lourd et calme. En bas, des bruits de couverts et de fin de repas. Je me demande ce qu’il adviendra de toutes ses pensées pré-langagières.
Dans le métro, ligne 2, je pioche une phrase au hasard dans le gros livre de ma voisine, et lis : « Il soutint son regard sans baisser les yeux ». Un bruit strident se fait entendre entre Jaurès et Stalingrad, au passage d’une zone de travaux qui dure depuis des mois. Je ne m’y habitue pas. Comment peut-on écrire et publier une phrase pareille ? Il soutint son regard sans baisser les yeux. Je me tenais debout sans m’assoir. Je passe le reste du trajet à ruminer sur ces auteurs et éditeurs qui écrabouillent l’énergie des verbes une seconde après qu’ils aient été posés sur la feuille. Au fond, je me délecte avec plaisir de ces colères faciles et un brin prétentieuses.
Grammaire : Elise, lisant la première mon manuscrit enfin achevé, tique sur mon emploi récurrent de la forme « commencer de » plutôt que « commencer à », comme dans l’exemple « L’eau commence de tomber sur les assiettes et les verres ». Si les deux formes sont aujourd’hui acceptées, il demeure une subtilité : « commencer à » indiquerait le début d’une action vague, sans limites de temps, quand « commencer de » serait le point de départ d’une action allant d’un point A à un point B. Au fond, dis-je à Elise, le plus gros souci est d’ordre euphonique, c’est-à-dire que le choix se porte sur la qualité sonore du texte. Et c’est sur ce point justement que nous tombons en désaccord. Elise de conclure : « c’est toi le chef ». Je suis pris de doutes. Dois-je, parce que je suis écrivain, imposer au lecteur des décisions totalitaires ? Je m’en remets à mon oreille, toujours bouchée par l’otite, hélas, et qui ne me transmet plus les informations du monde extérieur qu’à un tiers.
Au travail, je suis emmitouflé dans la grosse écharpe qu’Elise m’a offerte. Je me promène avec l’application Yuka, scanne les produits que mangent mes collègues et leur annonce s’ils vont vivre ou mourir. Mon capital sympathie vire du mieux au plus bas.
Des phrases : L’émotion, c’est la même chose que l’intelligence, en moins prétentieux. (Jacques A. Bertrand, Le Pas du loup)
Il aimait dire : « Ne pense jamais que le nom est la chose, car il n’y a que la chose qui existe, les noms ne sont que des pièges, des pièges pour t’aider à t’en souvenir. » (Gabriel Tallent, My Absolute Darling)
Et puis ce livre incroyable, Les saisons de Maurice Pons, dont étonnamment je n’ai su dégager aucun extrait mémorable, tant c’est l’ensemble qui l’est.
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valeriehervo · 6 years ago
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Tous les indicateurs – nombre de divorces, baisse de la conjugalité, traitement des violences conjugales – démontrent que le couple est une institution en crise, une entité amenée à disparaître », écrit Marcela Iacub, chercheuse au CNRS dans son essai La Fin du couple(1) . Quant à l'écrivaine Virginie Despentes(2), c'est avec un humour jubilatoire qu'elle pulvérise notre idéalisation de la vie commune : "Si on veut se mettre en couple, l'important c'est d'être réaliste. Une fille mettable, qui fait à bouffer, qui n'a aucune habitude dégoûtante et te supporte tel que tu es, sans chercher à te mettre au pas et te faire aimer les légumes verts, on ne peut pas en demander beaucoup plus à l'amour."
Radicales, nos figures féministes ? Lucides, plutôt, si on s'en tient aux statistiques de l'Institut national d'études démographiques (Ined) : en France, en cinquante ans, la norme conjugale a laissé place à un certain désordre amoureux : 44 738 divorces pour 350 000 mariages en 1968 contre 128 000 divorces pour 229 000 mariages en 2018. Mais depuis la révolution de mai, être en couple, ce n'est plus forcément avec la bénédiction de l'Eglise. Depuis vingt ans, le mariage traditionnel a été complété par d'autres formes d'unions, comme le Pacs – 186 000 en 2017 – qui incluent les couples homosexuels, et le mariage pour tous(3) . Aujourd'hui, chaque année, il y a plus d'unions enregistrées devant les autorités qu'en 1968.
La transformation du couple
Le couple n'est pas mort, il s'est transformé. "On assiste à une augmentation du nombre de relations amoureuses dans les trajectoires individuelles. La première mise en couple prend ainsi de plus en plus la forme d'une expérimentation d'un mode de vie et s'inscrit de moins en moins dans une perspective éventuelle de mariage et de constitution d'une famille », analysent les chercheurs de l'Ined(4) . "Je sortais depuis un mois avec un collègue tout juste divorcé, raconte Emmanuelle, 25 ans, professeure d'anglais à Paris, j'étais très amoureuse mais quand il m'a lancé, “on est en couple maintenant”, j'ai été un peu déstabilisée. Etions-nous déjà un couple ?"
Dire qu'on est en couple, c'est appartenir l'un à l'autre, et être capable d'imposer à l'autre la fidélité. Et l'union est définie par le fait de vivre ensemble sous le même toit
La réponse est plus simple quand on est comme Laurent Toulemon, directeur de recherches à l'Ined : "Dire qu'on est en couple, c'est appartenir l'un à l'autre, et être capable d'imposer à l'autre la fidélité. Et l'union est définie par le fait de vivre ensemble sous le même toit." Et comme pour Emmanuelle, un quart des premières unions se font désormais avec un conjoint qui a déjà vécu en couple. Avec la libération sexuelle, les femmes ne s'interdisent plus de vivre plusieurs histoires d'amour : "A peine 7 % des femmes nées en 1950, mais 50 % de celles nées en 1985 ont connu plus d'une union avant l'âge de 25 ans", poursuit le chercheur.
"Pour être un individu, il vaut mieux être deux"
"Pourquoi le couple existe encore" serait donc la vraie question. "C'est une énigme, répond le philosophe Pierre-Henri Tavoillot(5) . Dans une société individualiste, la réponse qu'on pourrait avancer est que pour être un individu, il vaut mieux être deux. On avance ensemble et, contrairement au mythe du self-made-man, on ne se fait pas tout seul. Mais le grand défi du couple, c'est comment grandir et vieillir ensemble. Grandir, ce n'est pas la même problématique que vieillir, il faut rester sur le même timing."
C'est la bonne nouvelle et la mauvaise. Quand ça se passe bien, c'est formidable, mais ça peut se dégrader très vite. Etre en couple demande un investissement et une qualité d'échanges infiniment plus importants que par le passé.
Parmi nos couples témoins*, Anne Nivat et Jean-Jacques Bourdin parlent d'une "évolution partagée", Nicole et Jean-Jacques Picart disent "nos personnalités ont évolué parallèlement", un équilibre fondé sur la complicité, le partage et l'égalité. "Sauf que nous sommes des individus formidablement libres, et totalement démunis, poursuit le philosophe. C'est la bonne nouvelle et la mauvaise. Quand ça se passe bien, c'est formidable, mais ça peut se dégrader très vite. Etre en couple demande un investissement et une qualité d'échanges infiniment plus importants que par le passé. Les codes ne nous tombent pas du ciel, il faut les inventer au quotidien." Le piège est de rester sur des modèles traditionnels alors que l'égalité des sexes est (normalement) acquise. "C'est à la fois très important et déstabilisant. Il y a 50 ans, la femme était encore parfois mineure, avec moins de droits. Le couple est désormais formé de majeurs dont le grand défi est de partager les tâches. On est presque dans une petite société démocratique avec deux personnes qui ont égalité de voix et il ne tient qu'à eux d'organiser leur existence."
"Plus égalitaires en termes de partage des tâches"
Cette liberté et nos échecs qui parfois en découlent nous fragilisent. "Le préjugé à la mode au XVIIIe est qu'on ne doit pas aimer son mari, on rentrait dans la ronde des adultères, il n'y a pas alors de responsabilité morale de l'individu, explique Claude Habib, professeure de littérature du XVIIIe 6) . Dans la société moderne où il n'y a plus de pression familiale, où chacun est responsable de son choix érotique, l'échec est plus douloureux. Certes, on ne croit plus au couple avec la foi du charbonnier qu'avaient nos grands-mères, mais je pense qu'il résiste grâce à la certitude et la mémoire de ce qu'on vit. Le récit d'une existence a une autre saveur quand il a été partagé, "tu te rappelles ce jour-là, tu portais ta petite robe noire et tu as dit… ”. La mémoire individuelle est volatile, la vie commune efface, elle, l'indécision de ce qu'on a vécu, l'autre en est le témoin et le dépositaire, c'est équilibrant. Les existences solitaires sont plus menacées par la dépression."
Si vivre seule est apparemment une gageure, une petite révolution détectée par les démographes de l'Ined est passée inaperçue. Pendant longtemps, les femmes les plus diplômées aux revenus élevés étaient plus vouées au célibat. "Elles faisaient peur aux hommes, ou se mettaient trop tard à la recherche d'un compagnon, explique Laurent Toulemon. Cela a changé, il y a eu récemment un retournement de situation. En France et dans d'autres pays occidentaux, aujourd'hui, à 40 ans, les femmes cadres diplômées sont autant en couple, voire plus, que les femmes peu diplômées et sans profession. Contrairement aux autres, elles ont moins de réticences vis-à-vis de l'hypogamie, cela ne les gêne pas de vivre avec des hommes moins diplômés et moins bien payés qu'elles. On constate d'ailleurs que ces couples sont plus égalitaires en termes de partage des tâches."
Une preuve, s'il en fallait, que le couple échappe à tout mode d'emploi.
Le couple, contre toute attente est encore à la mode!
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reseau-actu · 6 years ago
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Star de l’intelligence artificielle, ancien patron de Google en Chine, capital-risqueur installé à Pékin, Kai-Fu Lee, de passage à Paris, explique comment la Chine est en train de devenir le leader de cette technologie. Mais il se refuse à être pessimiste. En avant-première de l’essai choc qu’il publiera en France à l’automne, intitulé La plus grande mutation du monde, il revient sur son espoir d’une société de service humanisée.
Propos recueillis par Charles Jaigu
Dans mes livres et mes interventions publiques, j’essaye d’expliquer pourquoi l’intelligence artificielle va effectivement changer le monde, et j’ai choisi d’adopter à ce sujet une approche optimiste. Être optimiste ne veut pas dire être techno-béat. Car il va y avoir beaucoup de problèmes à régler. Tout comme il y en eut quand l’électricité et d’autres révolutions techniques ont entraîné beaucoup de désordres, de guerres et de chaos. Nous faisons face au même genre de défis. Je ne dis pas que tout se passera en douceur, mais qu’à la fin nous réussirons à dépasser ces problèmes. A la fin des fins, la technologie produira plus de bien que de mauvaises choses.
D’après mes calculs et ceux d’autres économistes, on peut supposer que dans vingt ans, environ 40 % des métiers disparaîtront. C’est beaucoup! Malgré la force du marché privé et les bonnes intentions des entrepreneurs sociaux, les laissés-pour-compte seront nombreux. Les inégalités criantes et la pauvreté extrême qui affligent encore une grande partie du monde aujourd’hui ne pourront pas être acceptées comme telles. Pour refondre totalement les structures économiques, il faudra souvent avoir recours à l’Etat. C’est pourquoi l’écriture d’un nouveau contrat social pour l’ère de l’intelligence artificielle va nécessiter d’actionner beaucoup de leviers. Les associations bien sûr, mais aussi les politiques publiques.
De quel droit le ­gouvernement dicterait-il aux individus la façon dont ils doivent ­s’occuper ? Cette réaction reflète une vision de la société peuplée d’utilisateurs plutôt que de citoyens
Certains voudraient régler cette situation nouvelle par la distribution d’un revenu universel de base. La nature inconditionnelle de ce revenu est en adéquation avec le laisser-faire emblématique de la Silicon Valley. De quel droit le gouvernement dicterait-il aux individus la façon dont ils doivent s’occuper? Cette réaction reflète une vision de la société peuplée d’utilisateurs plutôt que de citoyens, de clients plutôt que de membres d’une communauté.
Mon approche est bien différente. Je refuse de vivre dans une société divisée en castes technologiques, avec une élite enfermée dans un univers d’une richesse presque inconcevable et comptant sur des allocations dérisoires pour s’assurer que les masses inemployées restent sagement à leur place. Nous devons créer un système qui subvienne aux besoins de tous les membres de la société et qui utilise la richesse produite par l’intelligence artificielle pour construire une société plus compatissante.
Face à la transformation complète du marché du travail, je crois que nous pouvons faire quelque chose, et cela peut être une combinaison entre une meilleure éducation et la réinvention d’un statut social valorisé pour les métiers de service qui supposent de la compassion, et la relation bienveillante avec d’autres personnes. Il y a quelques années, lorsque j’ai appris que j’avais un cancer, cela m’a fait changer de point de vue sur la vie et j’ai découvert l’importance de la relation avec les autres, en premier lieu avec ma famille. J’ai alors été bouleversé par l’approche très différente du monde qu’avaient les moines bouddhistes vers qui je m’étais tourné.
Dans les monastères, d’innombrables volontaires accomplissent ces actions d’aides et de soutien. Ce sont ces actions qu’il faut valoriser. Car ce sont elles qui vont rester quand toutes les tâches routinières seront assurées par des algorithmes ; il faut donc redonner à ces activités liées aux relations humaines un sens fort d’utilité sociale et une très haute considération. Il nous incombe d’exploiter l’abondance économique générée par l’intelligence artificielle pour encourager ces activités. Nous aurions là les piliers d’un nouveau pacte social qui valoriserait et récompenserait les activités socialement bénéfiques de la même façon que le sont actuellement les activités économiquement productives.
Je suis convaincu que ces activités seront suffisamment variées pour que tous les travailleurs évincés par l’intelligence artificielle puissent trouver leur voie. Les individus dotés de bonnes capacités relationnelles choisiront peut-être de se tourner vers les soins. D’autres pourront s’inscrire dans des programmes de formation professionnelle. Et ceux qui sont inspirés par une cause sociale auront la possibilité d’opter pour un métier de service ou de défense des droits. Dans une économie dont les machines intelligentes seront devenues les rouages principaux du nouveau marché du travail, j’espère que nous saurons valoriser l’ensemble de ces domaines d’activité comme faisant partie d’un nouveau projet social: bâtir une société plus humaine. 
La plus grande mutation du monde, de Kai-Fu Lee (Les Arènes).
Lee Kai-Fu Source: premium.lefigaro.fr
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cequilaimait · 6 years ago
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Knut – 6. Vendredi – L’anniversaire de Knut – 6.2 Tout se dire (2/3)
Quelques minutes plus tard, le reste de la troupe arriva. Les voyant, Justin se leva et leur fit un grand signe de la main en criant leurs prénoms, afin qu’ils repèrent immédiatement où ils devaient se rendre. Lillemor, qui menait la danse, tiqua en voyant son petit ami perdu dans ses paroles, et s’assit à ses côtés. Sabina et Hakon suivirent en portant les cadeaux et choisirent les extérieurs. Enfin, Knut apparut à son tour, souriant et lumineux, à l’image de ses cheveux dorés qui reflétaient parfaitement les néons éclairant l’espace. Sans même enlever son manteau, il se jeta en avant pour récupérer un bout de banquette, à côté de Justin. Comme un enfant excité, le héros du jour tenait absolument à être le plus proche possible de son « copain français » pour lui parler de sa journée, des gentils mots qu’il avait reçus et des conneries qu’il aurait préféré faire avec lui plutôt que d’étudier, le tout en affichant un immense sourire sincère. Mais avant même qu’il ne finisse sa première phrase, Lillemor le coupa :
« Bon, c’est pas tout, ça, mais faudrait peut-être que tu penses à enlever une couche ou deux ! Sinon, tu vas avoir froid en sortant tout à l’heure ! »
Obéissant naturellement à sa sœur, Knut se débarrassa de sa parka kaki et afficha à nouveau sa magnifique tenue et ses ongles couverts de verni mat. Le regard malicieux qu’il lança à sa sœur – comme une demande d’autorisation – indiqua cependant qu’il n’en avait pas totalement fini avec son effeuillage. D’un geste amusé de la tête, Lillemor lui confirma qu’il avait tout à fait le droit d’en profiter un peu et de se mettre à son aise, par exemple en desserrant ce col et en déboutonnant sa chemise jusqu’au dernier bouton d’en bas, avant d’en faire doucement glisser le haut dans son dos afin de découvrir son cou, le chocker en cuir blanc et la croix en argent incrustée de pierres bleu ciel qui l’ornaient ainsi que le haut de sa folle jeunesse.
Enfin, « découvert », ce dernier ne l’était pas totalement. Car l’adolescent cachait directement sur son épiderme un body résille noir si près du corps qu’il se déposait sur son torse et ses bras comme une seconde peau. Porter ainsi sa chemise n’avait aucune autre utilité que de montrer à tous le maillage qui redessinait chacun de ses muscles. Lillemor l’avait conçu elle-même, en misant fortement sur la coupe et l’inconscience de son frère pour faire chauffer la température. Ce qui était parfaitement réussi. Il avait seize ans, et déjà qu’il était magnifiquement beau, il avait bien gagné le droit aussi d’être sexy, quand bien-même n’en avait-il pas vraiment conscience malgré le fait que le tissu ne tenait accroché qu’en trois points, un au milieu du biceps et un de chaque côté des épaules, ce qui leur permettait de s’afficher à nu, et donc de recevoir innocemment les petits bisous des uns et des autres. Justin, d’ailleurs, ne manqua pas l’occasion d’y déposer rapidement ses lèvres en guise de caresses, tout en lâchant un petit « oups » de gêne en se rendant compte de ce qu’il faisait. À sa décharge, lui avait déjà commencé à boire son mojito, et son frêle organisme tenait très mal l’alcool. Il préférait prévenir, histoire que personne ne soit surpris.
Du coup, tous passèrent commande pour l’accompagner. Une bière pour Hakon, un bloody Mary pour Sabina, un verre de vin blanc pour Lillemor, une préparation maison pour Viktor et un chocolat chaud avec une toute petite goute de Whisky dedans pour Knut. Ce n’était pas parce qu’il avait enfin seize ans qu’il pouvait drastiquement changer ses habitudes et oublier sa bonne conduite. Il avait des parents à la maison qui l’attendaient et une sœur qui le surveillait. Il ne pouvait pas non plus faire n’importe quoi, pas comme l’autre chaton bien loin de son domicile familial qui avait encore des sous à dépenser et une soif à assouvir !
« Une Pina Colada pour moi ! A Pina Colada, please ! Et euh… un énorme bol de lait ! Nan, deux ! Two Bowls of Milk. Yes. Voilà. Purée, j’parle trop bien anglais, même les serveuses suédoises me comprennent ! »
Pour ça, en effet, les serveuses n’avaient aucun problème. Par contre, pour ce qui étaient des autres adolescents, ils étaient tous circonspects devant l’étrange demande. Deux bols de lait ? Pourquoi faire exactement ?
L’atmosphère était bonne. Justin se montrait de plus en plus câlin, sans la moindre bride pour le retenir. Coller sa joue à celle de son homologue était déjà considéré comme mignon. Ce n’était pas assez. Il voulait aller beaucoup plus loin. Il voulait profiter de cette bonne ambiance pour régler définitivement un différend qui n’avait que trop duré.
« Il y a un chaton de trop dans cette ville ! Knut, je te défie à un concours de lapement de lait ! Le gagnant gagne le titre officiel de chatonissime ! Le perdant gagne un câlin entre les seins de Sabina pour se consoler ! Et Sabina, fait pas cette tête, t’avait dit oui tout à l’heure ! Je ne veux pas le savoir qui tu n’étais pas au courant que je te demanderais ça, on parle ici de réparer le cœur brisé du chaton qui va perdre, c’est important ! Et pas de réconfort, pas de concours ! Miaou ! »
L’argument avait un certain poids. Justin était terrible. Il savait qu’avec cette proposition, il piégerait toute la tablée. Personne ne voulait obliger la pauvre Sabina à servir de peluche géante à deux gamins, dont l’un semblait parfaitement assumer d’être obsédé. Surtout pas Hakon. Mais personne à côté ne voulait manquer ce défi qui promettait d’atteindre de nouveaux sommets. Surtout pas Hakon. Le dilemme était ignoble. Le grand Suédois blêmit, puis rougit. Il devait refuser cette farce, ne serait-ce que pour l’honneur de sa petite amie. Il n’en avait pas la force ni l’envie. Et finalement, ce fut au défié d’indiquer s’il était prêt ou nom à accepter cet ultime duel. Ce qu’il fit assez naturellement, d’un simple petit cri spontané.
« Mjau ! »
Pour faciliter le lapement, les deux bols furent déposés devant la table ronde à même le sol, sur lequel les deux chatons prirent place, à quatre pattes. L’objectif n’était pas de finir le breuvage le premier. Non, une telle règle n’aurait été ni drôle, ni intéressante. Le véritable enjeu était tout autre. Être le plus mignon possible.
Justin lança les hostilités en fixant son adversaire et en trempant de manière provocante le bout de sa langue dans le liquide, avant d’en tirer une première gorgée, en ronronnant. Immédiatement, Knut lui emboita le pas en plongeant ses lèvres dans son propre bol, puis en se les léchant jusqu’à la dernière goute. Admettant d’une légère moue que le jeune Suédois avait une méthode intéressante, le Français se relança à l’assaut de son breuvage. Les yeux fermés, il lapa doucement sans s’arrêter pendant de longues secondes, comme le ferait n’importe quel petit chaton affamé. Knut en fit immédiatement de même. Il trouvait l’exercice particulièrement agréable et naturel. Même si, du coup, il avait du lait qui lui coulait sur le menton et la joue. Se redressant fièrement, le visage adorablement barbouillé, il toisa son rival d’un sourire fermé mais prononcé, puis osa le provoquer :
« Mjaaaaaaaau ? »
À ce mot, Justin le regarda avec une pointe d’agacement. Lui aussi en avait plein le museau. Mais à la différence de son pauvre compère, provocant mais profondément innocent, il en avait vu d’autre. Il maitrisait le game. Il avait toujours sa botte secrète en réserve : aller chercher le lait là où il était, fut-ce sur la fossette et le coin des lèvres de son ennemi. Seul le mouvement de recul de Knut, encore plus surpris que les spectateurs, le sauva d’un premier baiser. Mais pour le reste, le geste de tendresse féline de son camarade était tellement fort qu’il en renversa son propre breuvage, ce qui couta cher en serviettes en papier pour tout de suite tout éponger.
Ravis de son effet, Justin fixa à son tour son adversaire en se mordillant les babines. Lui aussi savait miauler :
« Miaaaaaaou ? »
Tremblotant et presque vaincu, Knut réussit tout de même à se reconcentrer. Le duel ne serait terminé que lorsque leurs quatre amis auraient voté. Puisque son propre bol s’était envolé, il ne lui restait plus qu’une seule chose à faire : aller directement se sustenter dans celui du voisin.
Surpris, Justin admira tout de même l’effort, et accepta de partager. Nez contre nez, ils pouvaient mieux se regarder dans les yeux. Le duel devint intime. Leurs langues se frôlèrent à chaque gorgée. La tension entre eux était folle. Trop peut-être. Prétextant un coup de chaud, Hakon tapa du poing sur la table pour mettre fin à cette mascarade.
« Knut est clairement le plus mignon, mais je refuse que Justin fasse un câlin à ma copine ! Match nul ? »
Si ses motivations étaient mauvaises, sa conclusion restait la meilleure. Ni Viktor, ni Sabina, ni Lillemor ne se sentaient capable de trancher. Franchement, l’air était tellement étouffant dans ce bar…
Le verdict, malheureusement, fit deux déçus. Se donner autant de mal à être mignon pour qu’à la fin, personne ne tranche ? Knut et Justin protestèrent ! Il ne pouvait pas y avoir deux chatonissimes. Si personne n’avait le courage de les départager, alors soit, ils remettraient le titre en jeux pour la prochaine fois. Et en attendant, ils voulaient le câlin des perdants. Enfin… Justin l’exigeait pour deux, ce qui était tout comme. Hakon grinça assez naturellement et répondit qu’il en était hors de question. Sabina, elle, assuma jusqu’au bout :
« Une promesse est une promesse ! Allez, les deux en même temps ! Profitez-en bien ! Mhhh ! Non, on n’a pas dit oui aux coussinets ! Range-les Justin ! Oh, Lilly, j’ai l’impression que ton petit frère vient de découvrir un truc, là, il est tout rouge… »
À la colère froide d’Hakon répondit la gêne incroyable de Knut – il ne savait plus où se mettre, mais purée, Justin avait clairement eu raison : un truc pareil, ça remontait bien le moral ! – et l’insouciance des autres. La soirée, elle, pouvait se poursuivre, avec une deuxième salve de commandes, dont un mojito pour le jeune Français.
L’ambiance était joyeuse. Justin était de plus en plus à l’aise, pour ne pas dire complètement beurré. Sa non résistance à l’alcool avait quelque chose d’amusant. Elle le désinhibait. Il rigolait de tout et faisait rire d’encore plus de choses. Rien que la tête de Knut qui ne se remettait toujours pas de l’après-duel était hilarante. Tout comme la grimace qu’il fit en trempant ses lèvres dans le verre de son camarade pour s’enivrer un peu lui aussi. Mais cela n’était rien à côté de son aveux, chuchoté à l’oreille pour que personne d’autre ne l’entende :
« Je te hais ! Je déteste ça ! J’viens d’avoir exactement la même réaction que quand tu m’emmerdais hier au Musée Nordique ! T’as de la chance que mon genou soit trop loin de tes couilles, sinon, elles te seraient remontées dans la gorge ! »
Ce n’était pas faux. Mais plutôt que de blêmir et de déglutir, Justin préféra en rire. Il se sentait bien. L’heure était venue d’un nouveau jeu qu’il avait en tête. Prenant son courage à deux mains, il fit de la place devant lui et… grimpa sur la table à genoux. À l’embarra des autres, trop paniqués et enivrés pour penser à le faire descendre.
Il ne lui restait plus qu’à réciter le texte qu’il avait prévu et répété toute l’après-midi dans sa tête, pour ce moment précis :
« Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de Kisse, et je voulais qu’on joue à un jeu. Le jeu de la vérité. C’est un jeu très simple ! On parle tous, chacun notre tour ! Et on doit dire une vérité sur un sujet en particulier ! Mais si jamais on ment, alors le maître du jeu embrasse celui qui fête son anniversaire ! Donc pour chaque mensonge, je roule une pelle à Knut ! Ça te va, Knut ? »
Les yeux écarquillés et le nez collé avec ses mains sur le rebord de la table, le concerné ne répondit même pas. Les jeux de Justin étaient incroyablement gênants. Il avait peur pour sa bouche. Mais en même temps, le dernier avait été tellement agréable… Et son camarade aux cheveux roses brillait d’une telle légèreté à tanguer debout sur son piédestal en le regardant tendrement…
« Mjau ? »
L’intérêt d’un miaulement, c’est qu’à moins de parler directement à un autre chat, personne ne comprend jamais vraiment ce que vous voulez dire, ce qui laisse ouvertes toutes les interprétations.
« Ok, c’est parfait ! Lilly, on commence par toi ! Dis-nous ce qu’il s’est passé pour toi le 30 octobre dernier ! Et pas de mensonge, hein, sinon, bisou à ton p’tit frère ! »
La question se voulait farfelue. Elle était loin de l’être. À l’énoncé de la date, tous les convives autour de la table devinrent blêmes, sans exception. D’abord sonné, Lillemor se reprit rapidement et agrippa Justin par le poignet, pour le faire descendre de son perchoir juste avant l’arrivée de la serveuse. Furieuse, l’adolescente l’engueula en lui disant d’arrêter ses stupidités. Qu’il ne s’était rien passé ce jour-là. Ce à quoi le jeune Français répondit par un regard éteint, mais une verve bien vive.
« Oh. Donc tu veux pas nous parler de ce dont on discutait avec Viktor tout à l’heure ? C’est méchant ! C’est un mensonge ! J’vais être obligé d’embrasser Knut, moi ! Ou de le dire à ta place ! Knut, tu préfères quoi ? Un bisou ou la vérité ? »
À ces mots, la jeune femme vit rouge et dévisagea son petit ami avec des yeux remplis d’une haine des plus incroyables. Complètement pris au dépourvu, ce dernier nia de toutes ses forces. Enfin, c’était n’importe quoi ! Jamais il ne se serait permis quelque chose comme ça ! Justin délirait totalement…
« Te fous pas de ma gueule ! », hurla l’adolescente, oubliant de repasser au suédois. « Je vous ai bien vu discuter tout à l’heure en arrivant ! Comment tu as pu lui dire un truc comme ça ? En plus, sans doute pour lui raconter de la merde et ta version à toi ! »
Assis sur sa chaise, les mains sur le visage, les index posés sur les coins intérieurs des yeux, Justin admira avec un peu d’effroi son œuvre. Jamais il n’aurait cru qu’un bluff aussi total marcherait aussi bien. En réalité, il n’avait strictement aucune idée de quoi il était question. Tout juste avait-il perçu la veille que cette date faisait sens pour Knut, mais aussi pour Viktor. Le reste, il avait supposé et tenté le tout pour le tout. Ne manquait plus qu’une seule petite chose. Une seule étincelle pour enfin arriver à cette réaction en chaine en mode domino qu’il avait consciencieusement préparée toute la journée. Deux petits mots, qui arrivèrent brusquement, portés par une voix douce et brumeuse.
« La vérité… »
« Comment ça ? », demanda Lillemor, choquée par l’intervention de son frère, dont les larmes avaient commencé à doucement couler sur son visage.
« La vérité ! J’m’en fous de son bisou ! J’veux la vérité ! J’comprends pas pourquoi tu réagis comme ça. Ça me stresse. Ça veut dire qu’il y a des choses que j’ignore ? C’est pas possible, ça. Dites-moi la vérité ! »
S’il ne pleurait pas complètement, au moins gémissait-il. Suffisamment en tout cas pour que tout le monde se braque, sauf Justin, seul à avoir retrouvé un semblant de calme.
Au bord de la crise de nerf, la lycéenne serra les poings, et répondit calmement à son frère. Elle avait beau être furieuse, elle avait sa fierté et son honneur.
« Ce matin-là. Quand tu m’as trouvé en train de chialer alors que tu rentrais de chez Daniel. Je t’ai envoyé chier, et après tu as fait ce que tu sais… J’avais passé la nuit avec Viktor. Pour… Enfin tu vois, quoi. C’est pour ça qu’on t’avait demandé de dormir chez un pote. Parce qu’avec notre cloison ultrafine, j’pouvais pas faire ça à côté de toi. Et c’était juste nul. C’est pour ça que je pleurais. J’ai eu mal, on s’est disputés, j’étais furieuse, et tu m’as vu à moitié à poil en train de chialer. Donc je me suis vengé sur toi en te criant dessus, alors que tu n’avais rien fait… J’suis désolé Kisse. Je n’aurais pas dû. C’est ma faute… Je n’aurais pas dû te traiter d’égoïste et ne pas tenir ma promesse de faire les boutiques avec toi l’après-midi, alors que ce jour-là, tu en avais vraiment besoin. Et depuis, cet imbécile, s’il tire la tronche et se comporte presque comme un étranger avec toi et moi, c’est parce qu’il culpabilise ! Parce qu’il pense que tu lui en veux de m’avoir touchée et fait pleurer. C’est pour ça que c’est la merde ! Et il a sans doute dû aller raconter ses conneries à Justin au lieu de simplement accepter qu’on en parle et qu’on passe à autre chose, comme je l’attends depuis des semaines… »
Livide, Knut ouvra simplement la bouche pour respirer. Ses poumons allaient exploser. C’était beaucoup d’informations d’un coup. Presque trop. Lilly culpabilisait pour son geste à lui ? Elle ne le lui avait jamais dit, et cela lui bousillait la poitrine. Si Viktor était si étrange et distant, ces derniers temps, c’est parce qu’il s’imaginait de la colère et de la rancœur ? Pour une chose que Knut ignorait en plus. Cette chose qui, il est vrai, passait relativement mal.
Sa sœur n’était plus vierge.
Sa sœur bien aimée, son modèle, la personne qu’il aimait le plus au monde, la femme qu’il associait dans son esprit à une super-héroïne. Elle avait fait « ça » ?
Malheureusement, il n’eut ni l’énergie, ni le temps de répondre. Un autre garçon, lui aussi en larmes, s’était emparé de la parole. Il s’agissait de Viktor, couvert de spasmes.
« Bien sûr que c’est ma faute ! Je t’ai fait mal ! Je voulais assurer et je me suis comporté comme un salaud à reproduire des conneries de films pornos parce que je pensais que ça t’exciterait ! J’ai ruiné la première fois de la femme que j’aime ! Et le week-end où son frère avait le plus besoin d’elle, en plus. Ce week-end précisément où tes parents n’étaient pas là ! Alors qu’on le savait. Mais on a préféré l’éloigner de nous pour en profiter et ne pas avoir à supporter sa tristesse, parce qu’on avait peur que ça nous bloque ! Et le lendemain, alors qu’il a besoin de toi, je te laisse en pleurs ? Bien sûr que c’est ma faute ! Comment veux-tu que je vous regarde dans les yeux ? J’voulais me marier avec toi un jour ! Je voulais que Knut devienne vraiment mon frère ! Et j’ai tout fait foirer ! Et depuis, je subis son regard plein de haine tous les jours ! Tous les jours ! »
Toujours le cul fixé à son siège, Justin hallucinait complètement. S’il s’était imaginé beaucoup de choses, jamais il n’aurait pu croire à une histoire pareille, avec autant de rancœur et de remords. Il avait ouvert la boite de Pandore. Il ne contrôlait plus rien. Même Sabina, sur la chaise à côté, le tenait par la main en espérant que l’orage passe sans drame.
De son côté, le visage rouge, la gorge nouée et pris d’un hoquet tremblant, Knut bredouilla quelques mots en se tenant la tête. Tout ça, c’était n’importe quoi.
« Vik, comment tu voulais que je t’en veuille pour un truc que je savais même pas ? Si je te regardais bizarrement ces dernières semaines, c’est juste parce que tu étais distant, que tu ne me faisais plus de câlin… J’comprenais pas pourquoi t’étais plus pareil alors qu’on était aussi proches avant… J’pensais que toi, tu m’en voulais et j’comprenais pas pourquoi… »
Tant des non-dits. Cela faisait beaucoup. Trop peut-être. Et il y en avait pourtant tant d’autres, qui s’accompagnaient toujours de culpabilité. Celle d’Hakon, par exemple, était insupportable. Vivre avec était une torture. Les autres n’avaient aucune raison de s’en vouloir. Quelques soient leurs erreurs, ce qu’il avait fait était bien pire. À ses yeux, comme il pouvait le lire dans ceux de son chaton qui connaissait son crime, il était le seul responsable. Il devait le dire. La gorge noueuse et les mains moites, il trembla, puis arracha la parole à ses camarades, à leur plus grand étonnement :
« C’est ma faute. »
« Mais pas du tout ! » protesta Knut, affolé et toujours dégoulinant. « Tu vas pas t’y mettre toi aussi ? Bordel ! »
« SI ! », s’emportant son interlocuteur. « Je voulais t’aider alors que tu allais mal, et j’ai fait tout l’inverse ! Je pensais que te parler et te sortir le nez de tes croyances t’aiderait à aller mieux. Parce que j’étais trop stupide et fier de moi pour comprendre que tu en avais besoin. J’ai voulu casser tes certitudes, parce que je voulais avoir raison. Une semaine avant… Je t’ai enlevé la seule chose qui te faisait tenir ! »
S’agrippant à la croix fixée à son collier, Knut trembla plus encore, les yeux fermés. Il gémissait. Il n’était pas d’accord.
« Mais nan ! », pleura-t-il. « C’est pas ta faute. C’est moi. C’est rien que moi. Toi, tu m’as ouvert les yeux. T’y es pour rien si pendant un an, j’arrivais pas à l’accepter et si je me mentais à moi-même. T’y es pour rien si j’était con… T’y es pour rien s’il n’y a pas de Dieu pour s’occuper de Mamie… C’est pas ta faute… »
Chaque révélation était plus dur à encaisser que la précédente. Même si personne autour de cette table n’ignorait que la foi de Knut s’était particulièrement étiolée ces dernières semaines – le petit cul-béni n’avait pas prié une seule fois depuis ce fameux jour d’octobre dont il était question – l’entendre le dire et l’admettre lui-même, alors qu’il n’avait eu de cesse de continuer à prétendre l’inverse et à se faire passer pour ce qu’il n’était plu avec toujours la même application morale, cela faisait un choc. K.O, Lillemor resta au fond de sa chaise. Cet anniversaire s’était peu à peu transformé en cauchemar. Ils avaient touché le fond.
Ne restait donc plus qu’à creuser encore peu. Même si Hakon avait, lui aussi, enfin tout déballé, la messe n’était pas encore dite. Ce garçon cachait toujours des choses. Justin hésita un peu avant d’agir. Il risquait clairement sa peau. Mais après tout, il s’en foutait. Rien ne pouvait le dévier de sa résolution. Terminant cul sec le fond de son verre, il se releva et s’approcha du plus âgé du groupe, avant d’essayer de sauvagement l’embrasser, dans le seul but de le provoquer et de lui faire perdre son calme. Furieux, ce dernier le repoussa comme prévu contre la table. Se tordant de douleur, le garçon aux cheveux roses se retourna vers Knut, se serra contre lui, fit mine de pleurer et pointa du doigt celui qui venait du lui faire mal.
« C’est lui le plus gros menteur de tous ! C’est un menteur ! Un vilain ! Il dit des choses, mais il t’aime pas ! Il te déteste ! Il voulait pas t’aider, il l’a fait exprès ! Il te cache la vérité ! »
Prêcher le faux pour savoir le vrai était peut-être une des techniques de manipulation les plus éculées et grossières au monde. Et pourtant, utilisée avec soin sur les gros caractères un peu bourrin, elle marchait à tous les coups. Alors avec Hakon, et son incapacité à exprimer ses sentiments et à garder son calme, c’était presque trop facile. Ce point était le seul sur lequel le chaton n’avait aucun doute. Après tout, le seul qui autour de la table n’avait pas encore grillé le grand blond, c’était Knut. Il était temps que lui aussi prenne connaissance de ce secret de polichinelle. Ainsi, tout serait vraiment enfin dit. Et comme attendu, alors que tous les regards se braquaient sur lui, inquisiteurs, Hakon hurla :
« C’EST FAUX ! Je ne le déteste pas ! Je… Je l’aime ! Je suis amoureux de lui. »
Au moins, Hakon avait l’avantage d’être d’une constance rassurante. Prévisible jusqu’au bout des cheveux. Et comme il fallait s’en douter, Knut manqua de s’étrangler face à cette nouvelle.
« Que… Quoi ? Amoureux… dans le sens… Comme de Sabina ? »
Vu comment la jeune femme leva les yeux en soupirant, la réponse était forcément négative. Forcément. Bien sûr que non, il ne l’aimait pas comme il aimait Sabina, vu que lui, il l’aimait pour de vrai. Pire. Il le désirait. Ardemment. Depuis le premier regard. Tout simplement. Et ce fut donc forcé par les circonstances et trahi par son impulsivité et ses larmes qu’il s’agenouilla devant son petit prince pour lui avouer toute la vérité.
« Quand je t’ai vu arriver au lycée à la rentrée, avec tes fringues provocantes et ton air innocent… J’ai craqué. Je me suis tout de suite renseigné sur toi, et j’ai poussé la porte du club. Au début juste pour te regarder. Je ne savais pas. Je ne comprenais pas. J’étais obsédé. Et toi, tu m’as vu arriver, tu m’as souri et tu m’as parlé poésie… Puis tu as voulu m’aider à mieux parler… En trois semaines, vous m’aviez tous acceptés comme si j’étais avec vous depuis trois ans… Et tu as apprécié ma présence. On a discuté…Tu étais triste et je ne comprenais pas pourquoi. Les autres m’ont parlé de ta grand-mère. Mais j’voulais te réconforter. Tu serrer contre moi. Mais toi, tu refusais cette éventualité. Tu la rejetais parce qu’elle n’était pas conforme à tes croyances. T’as sorti des choses intolérantes sans même t’en rendre compte, alors que moi, je venais de tomber amoureux. Alors j’ai voulu débattre avec toi. Plusieurs fois. Je pensais que j’arriverais à te faire changer d’avis et faire voler tes certitudes en éclat, pour que tu puisses m’accepter. Et toi, tu… Pardon Knut. Pardon. Je n’arrivais plus à me regarder dans une glace. Je n’y arrive toujours pas. C’est pour ça qu’après, j’ai demandé à Sabina si elle voulait sortir avec moi. Parce que je ne pouvais pas. J’pouvais plus. Justin a raison. Je suis le pire de tous… C’est ma faute… »
Là, tout était vraiment dit. Un silence lourd et pesant se fit. Tous les convives, les jambes et la voix coupées, se regardèrent sans échanger de mot. Même la pauvre Sabina, qui n’avait rien dit, pleurait autant que les autres. De tous, Knut était naturellement le plus atteint. Dans un état parfaitement second, il n’avait même pas conscience de ce que la peine avait fait à son visage. Ses joues, brulantes, s’étaient creusées et tapissées de larmes qui inondaient son menton. Ses lèvres pâteuses tremblaient au rythme de sa respiration saccadée. Ses yeux étaient bien plus rouges que bleus. Son cerveau était en vrac. Il lui fallut bien une minute avant de réussir à suffisamment reprendre ses esprits pour enfin réagir. Tapant des deux poings sur la table, il laissa exploser sa colère. Il les détestait tous. Ils étaient trop cons. Ils ne comprenaient rien à rien. De quel droit ils avaient brisé son déni de toutes ces réalités ? Lui qui refusaient depuis toujours de les voir. Sa voix, mi-aiguë, mi-roque, glaça tout le monde sur place.
« Pourquoi ? Pourquoi vous m’avez dit tout ça ? Pourquoi vous pensez toutes ces conneries ? C’est ça mon cadeau d’anniversaire ? Moi… Moi j’étais juste malheureux et j’voulais simplement que vous m’aimiez… Pire anniversaire Ever ! J’vais là où m’attend mamie ! Bonne nuit ! »
La réponse ne l’importait guère. Là, il n’en avait plus rien à foutre. Oubliant sa parka et laissant de côté tous ses cadeaux toujours emballés, il se leva, poussa les chaises qui lui gênaient le passage et s’enfuit en courant de ce bar et de ces gens qu’il ne voulait surtout plus voir.
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